En visite à la prison de la Santé, il a pu s’entretenir avec le directeur du site, Bruno Clément-Petre, sur l’actualité du secteur et ses perspectives.

Alors que la question de la réponse pénale et du suivi pénitentiaire et, plus généralement, le devenir de la justice en France sont des enjeux prégnants dans notre société, la situation reste sensible, malgré des moyens en constante augmentation depuis 2018.

La solution bâtimentaire, bien que nécessaire, notamment pour remplacer des prisons insalubres ou inadaptées, ne pourra pas résoudre la question de la surpopulation carcérale.

« En effet, pour suivre l’évolution actuelle du nombre de détenus, il faudrait construire un établissement par mois. Cela n’est réaliste ni financièrement, ni administrativement, les constructions de prisons provoquant des oppositions assez fortes dans les territoires. » argumente Louis Vogel, et poursuit : « Il faut diversifier les lieux de détention. Il n’y a pas lieu d’avoir un seul modèle de prison, différencier en fonction des peines et des publics, notamment pour les jeunes, les criminels les plus dangereux et ceux atteints de troubles psychiatriques (qui sont à l’origine de 80 % des incidents) et qui nécessitent une pris en charge particulière. »

Les nombreux échanges au cours de cette visite permettent de constater que les moyens, et les politiques qu’ils financent afin de résorber la surpopulation carcérale et lutter contre la perte de sens des métiers de la pénitentiaire, ne pourront, seuls, produire les effets escomptés.

Les alternatives à la prison ne jouent pas suffisamment leur rôle. Elles ne se substituent pas à la prison mais sont réservées à un autre type de population.

Parmi les différents constats, il s’avère aussi qu’une partie importante des défaillances qui conduisent à la surpopulation carcérale et aux problèmes de réinsertion des détenus pourraient trouver une solution avant même le prononcé des peines, dès la phase d’opportunité des poursuites. Lors de cette étape, les juges devraient, par exemple, pouvoir être accompagnés par des professionnels en criminologie, en sciences sociales, en médecine… ce qui leur permettrait de prendre la meilleure décision de placement dès l’origine.

Quid de la politique pénale ? Louis Vogel l’assure : « la surpopulation carcérale provient également du durcissement de la réponse pénale et de l’augmentation de la durée moyenne des peines. Ce point doit nous conduire à nous interroger sur la politique pénale qui est menée et la manière dont elle est définie. »

Autant de propositions, audacieuses pour certaines mais qui méritent d’être replacées dans notre débat.

CLUB D'IÉNA • Le pénitentiaire au cœur de l’action pénale, Louis Vogel prend le pouls de la prison de la Santé

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